Je me fiche qu'ils aient volé mon idée... Je m'inquiète du fait qu'ils n'en aient pas eux-mêmes !Nikola Tesla

lundi 23 octobre 2017

Je suis désolé...

La vague actuelle de dénonciations des Rozon, Salvail, Parent et compagnie me ramène à de vieilles réflexions.

Premièrement, soyons clair, je trouve vraiment encourageant ce qui se passe au Québec et ailleurs.  Enfin, des comportements abjects sont dénoncés.  Enfin, des victimes se lèvent et racontent les faits.  Enfin, on brise le silence.  Donc, c'est un pas dans la bonne direction et ça me réjouit complètement.

Par contre, ce qui me perturbe, c'est de voir encore des gens blâmer les victimes.  Encore et toujours ce maudit réflexe de se dire que la victime y est sûrement pour quelque chose.  Et encore et toujours l'idée que la victime qui n'a pas dénoncé avant, ça cache nécessairement quelque chose.

Est-ce possible que juste d'imaginer les commentaires accusateurs soient une des raisons qui porte la victime à réfléchir avant de dénoncer ?  Est-ce possible que la victime en a déjà assez d'avoir été agressée, harcelée ou autre et qu'elle n'a peut-être pas envie d'avoir en plus à subir les commentaires désobligeants des gens à son endroit ?  Ou pire, à se justifier ?

Il est évident qu'il y a d'autres raisons qui la portent à garder le silence, comme la peur de perdre son emploi, la peur de ne plus pouvoir travailler dans le milieu, la peur de l'agresseur, le traumatisme subi, etc...

Mais le fait que, de façon générale, on finit toujours par trouver douteux le comportement de la victime devrait peut-être porter à réflexion, non ?

Oui mais, l'agresseur a sûrement vécu des choses horribles pour en arriver à agir de cette façon, il faut le comprendre, il a sûrement des raisons, des blessures...  qui sommes-nous pour juger....  il faut pardonner... 

Ok, attend une minute : il est L' A-G-R-E-S-S-E-U-R ! ! !  Pas la victime à c'que j'sache ?  Pis la victime elle ?  Elle a sûrement fait quelque chose pour en arriver là ou encore, elle a choisi de jouer le jeu pour avoir la job ?  Donc, elle est en grande partie responsable ou ça faisait son affaire. 

Mais bon, laissons faire la victime, revenons à l'agresseur...  pauvre petit pitou...  il a fait une erreur : tout le monde fait des erreurs, non ?  Donnons-lui une deuxième chance, c'est quand même injuste pour lui...

Comment se fait-il que, dans notre sacro-sainte société, on blâme presqu'invariablement la victime, on la responsabilise pour le comportement de son agresseur et que de l'autre côté, on trouve des excuses à l'agresseur, on minimise ses actes, on le prend en pitié et qu'EN PLUS, ça nous rassure sur nos qualités d'être humain de par la "grandeur d'âme" dont nous faisons preuve face au pauvre petit agresseur qui fait donc pitié ?  C'est rendu l'agresseur qui est la victime et la VÉRITABLE victime, rappelez-vous, celle qui a été agressée, elle, est blâmée ? 

Prenons le cas d'Éric Salvail.  Ici, on a affaire à un boss qui touche les parties intimes de ses employés, qui fait du harcèlement sexuel aux jeunes employés, qui leur demande des choses comme "quand est-ce que tu vas me sucer ?", qui se sort le pénis dans les meetings, qui met "son pénis sur le bureau des gens pour les surprendre", qui "propose de l'alcool à un mineur pour ensuite lui tenir des propos très crus et se livrer à des avances sexuelles claires"...  Et dans un autre contexte, on a un gars au gym qui parle de sexe d'une façon vulgaire sans arrêt, qui harcèle sexuellement, qui se masturbe en regardant d'autres gars au sauna, qui les suit dans les douches...  On parle aussi d'un comportement qui s'est étalé sur près de 15 ans.  Pas d'un faux pas dans une soirée trop arrosée.  15 ans...

Un jour après la parution de l'article dans La Presse, Éric Salvail publie un texte "d'excuse" sur son facebook (inclus ci-bas), texte qui, plus que probablement, a été rédigé par un avocat ou un expert en communication ou en gestion de crise, et BAM, plusieurs lui pardonnent !?!?  WOW !  Vraiment ?  Je comprends que c'est tout à son honneur qu'il n'ait pas tout nié en bloc comme d'autres.  Mais a-t-il fait ça uniquement parce qu'il n'avait pas d'autre choix ?

Voici quelques exemples de commentaires lus sur sa page :

"Omg Eric! Merci pour ton explication dans lettre. Mes yeux coulent comme si un grand ami éprouve un grand malaise dans sa vie. Toi tu es un grand ami de tous. Nous allons te manquer tellement mais prends le tout un jour à la fois et reviens nous en pleine forme. Entre temps nous sommes tous derrière toi pour une bonne guérison. "

"Il ne faut pas capoter à l'extrême, faut pas non plus exagéré. Éric n'a pas violé personne, il n'a pas abusé d'enfants, il n'a pas tué non plus . Oui c'était déplacé ça je suis d'accord , mais quand même il est question en grosse majorité d'hommes adultes qui pouvaient très bien se défendre si vraiment ils l'auraient vraiment voullu. Et ne venez pas me dire qu'ils ne fesaient rien par peur pour leur travail car , il y en a qui n'ont rien à voir avec le showbizz , comme le gars du ProGym entre autre."

"Tu es un grand homme Eric Salvail. Je te souhaite de passer cette épreuve entouré de gens qui t'aiment et qui ne te jugent pas car tu es ton propre juge face à la situation. Je te félicite et t'accompagne en pensées positives pour que tu puisses rebondir car tu vas grandir dans tes erreurs de parcours. Tu vas me manquer et je pense aussi à plusieurs personnes qui t'aiment et t'apprécient. Reviens-nous vite car ta bonne humeur est contagieuse. Bonne chance et encore félicitations car tu fais passer le bien-être de d'autres avant toi."

"Devenez pas fou!!!seigneur!!eric est qqun dextravertie!!..ok!!cest un secret pour personne!!...ouiii il a fait des avances ..comme il sen fait des million a chaque jour envers les femmes!!..ses avance on ete repousser ..point ...il a forcer PERSONNE!!!..son penis est pas entrer de force dans quiquonque!!!..et je suis persuader quil a agit a chaque fois ,pour faire rire les gens autour de lui..mais comme il y a toute sorte de gens...(facilement froissable)...alors il se passe ca!!..on est en 2017 ..on est plus dans les annee 60 .....seigneur!!..sa speut pas!!....et vous savez quoi....jai limpression que cest arranger ca!!....il y a des gens quil veulent te voir tomber eric..je nommerai pas de nom ...penser sy un peu ....et serieusement je peut pas croire que tu ne seras plus a la tele !!!...tu fait de la bonne tele ..personne va ou toi tes aller ...tu mas toujours fait rire au larme !!revient au plus vite!!!!!"

"Bravo Eric! Personne ne peut dire qu’ils ne font pas erreur dans la vie mais d’avouer ses torts est un grand pas vers la guérison..! Oui ça nous a déçu mais on t’aime quand même et on a hâte que tu reviennes!😁Bonne chance!"

"Il faudrait que les victimes se manifestent. C'est bien "cute" d'accuser mais fais-le en public et non anonyme. Je trouve ça bien bizarre que toutes les personnes qui l'ont accusé, ne veulent pas se montrer le visage!! Si tu dis la vérité alors pourquoi te cacher?"

"Si tu l'aimes pas ta juste a débarquer de son FB..."

"C est une decision mûre et tres réfléchie Eric. Tu est un bon vivant qui carbure a l'amour de ton public. Prend le temps et surtout de guérir tes blessures.c est deja un pas vers lavant!"

"Je ne connais pas le fond et tous les détails, mais ce que j'ai entendu au travers des médias ... Bon tu étais avant tout une personne intense et divertissante. Partant de là, oui faut s'attendre à des niaiseries (comique) de ta part. Est-ce qu'elles avaient toutes de bon sens ... Pas certain par contre ... On fait pas toujours que des bons coups."

"Tu dois avoir ecrit ce témoignage en pleurant a chaude larme....parce que moi.....le coeur ma briser en 4!!!! Tu es humain......comme nous tous!!!!! Bon repos!!!!"

"...Pour ce qui est des avances ... Le gars qui s'est dit pris au piège, c'était pas difficile de se défendre quand même. Pis l'autre costo, lui aussi pouvait se défendre ... Quelle femme n'a jamais eu à décliné, voir repousser les insistance de mecs un peu bourré ... Ca fait partie de la vie..."

Et ici, un extrait d'une série de commentaires :

"...J'en comprens juste une chose. Si un humour te deplait, parles en poliement. Avouez a un collegue que son commentaire ou propos est blessant...ca se dit et ca se comprend! Nul doute qu'avoir été averti ce grand animateur aurait fait attention comme il est capable dans bien des situations. La morale...parlez. Parlez rapidement. Pas des années après sur un ton accusateur"

"Je suis d'accord et je ne demandais aussi pourquoi personne n'a dit que ça leur déplaisait. .."

"Exact si personne parle comment peut il savoir?!"


J'ai trouvé ça triste d'abord pour les victimes.  Imaginez : tu es la victime de ses comportements déviants et tu lis "Bravo Éric !  On t'aime !  On est derrière toi !  Quel grand homme tu es !  Un exemple à suivre !  Je te félicite et t'accompagne en pensées positives !  Reviens-nous vite !"  Je devine combien ça doit vraiment être réconfortant.

Ensuite, j'ai trouvé ça ahurrisant.  Vous trouvez pas que ça fait peur ?  Autrement dit, Éric, t'es drôle, t'es fin, tu peux faire ce que tu veux, on s'en fout, on t'aime et on te pardonne.  Troublant...  Envoyez-lui donc votre fils un coup parti !  Il pourra peut-être s'en prendre à lui et laisser les autres tranquilles, non ?  J'ai déjà hâte de lire vos commentaires "l'erreur est humaine, qui suis-je pour juger, tu as admis tes torts, bravo, tu es un grand homme, reviens-nous vite !"  Après tout, c'est clair que c'est un bon gars, je l'connais bien, je l'vois tout l'temps dans ma ti-vi !

Empathie pour les victimes ?  Ben là, il faudrait en revenir parce que, en comparaison rappelons-le, nous on doit composer avec une grosse injustice parce qu'on le voit pus dans notre ti-vi ce qui rend nos soirées fort moins agréables depuis...  Donc, les victimes, ça va faire là !!!   Pensez un peu à ce qu'on subit, NOUS !

Ensuite, le fait qu'il écrive (ou qu'il se fasse écrire) une lettre "d'excuse", après près de 15 ans de comportements inacceptables, juste après qu'il se soit fait "pogné", et qu'il annonce qu'il va faire une démarche pour régler son problème, selon certains, ça prouve "une décision mûre et très réfléchie".  15 ans de comportements déviants et une prise de conscience mûre et réfléchie 24h après s'être fait coincé.  Ah ça c'est clair...

Et bien sûr, il harcelait des gars capables de se défendre, donc, c'est pas si grave. "Quelle femme n'a jamais eu à décliner, voire repousser les insistance de mecs un peu bourrés... Ça fait partie de la vie...".  Parce qu'en plus, ça fait partie de l'ordre naturel des choses que les femmes soient harcelées maintenant.  Ben coudonc...

Mise en situation : je suis un gars, gay ou straight n'a aucune importance.  Je vais au gym pour m'entraîner.  C'est tout-à-fait normal que je doive subir des remarques crues et du harcèlement sexuel pendant tout mon entraînement, d'être obligé de dire NON sans arrêt, d'essayer de me cacher comme je peux pour l'éviter, de voir le moron se masturber devant moi et d'être obligé de le pousser hors de ma douche ?  Sous prétexte que je suis capable de me défendre ?  On est sérieux là ?  Oui mais "nul doute qu'avoir été averti ce grand animateur aurait fait attention comme il est capable dans bien des situations."  Nul doute en effet !

Pour Gilbert Rozon aussi on a droit a des commentaires dans le genre que la fille, ben, elle l'a fait pour avoir la job, donc...  Qu'est-ce que le monde ferait pas pour de l'argent ?  Oui, oui, c'est clair que TOUTES les personnes qui ont fait ce genre de remarques ont eu à faire des pipes à CHACUNE de leur job.   Ben quoi ?  C'est TOUT-À-FAIT NORMAL : quiconque veut travailler se doit de faire une pipe, homme ou femme, dans n'importe quel milieu !  Autrement dit, regardez votre voisin : il a une job ?  Ben, il a fait une pipe !  Ça marche de même !  Venez pas vous plaindre en plus !  Non mais, avez-vous un peu réfléchi avant d'écrire ça ?  Combien de fois, vous, en avez-vous fait des pipes pour avoir une job ?  Combien de fois on vous a demandé ça avant même de penser à vous engager ?  Combien de fois avez-vous été obligé de vous mettre à poil en entrevue ?  Sérieusement ?

Pis regardons un peu le message d'Éric Salvail.  Avez-vous lu une réelle excuse dans sa publication ?  Parce que moi, ce que je lis c'est "je suis exubérant, j'ai un humour cru, jamais au grand jamais je pensais que ça déplaisait, je m'excuse."  Et tous les gens qui lui disaient qu'ils trouvaient pas ça drôle, ça lui a pas mis la puce à l'oreille sur le fait que ça déplaisait ?  Pis tous les gens qui lui disaient d'arrêter, ça non plus ?  Pis c'est sûr que de mettre son pénis dans la face d'une employée au travail, ça rentre dans la catégorie "humour cru".    C'est clair que harceler sexuellement un petit jeune sous son autorité, c'est de la grosse comédie ça aussi.  Comment ça s'fait que personne comprenne ça bordel ? 

Il me semble pourtant que ça ressemble davantage à une justification de son comportement plutôt qu'à des excuses sincères.  Tout ce temps-là, son comportement était, à ses yeux, tout-à-fait justifiable puisque lui, il faisait de l'humour, encore mieux, son intention était très positive car, après tout, il ne voulait que faire rire !   Les autres ben, cheese, ils comprenaient pas pis lui il s'en rendait pas compte non plus malgré toutes les fois où on lui en a parlé.  De son côté, il voyait tout ça comme "sans offense ou anodin",  mais aujourd'hui, il est désolé.  Un simple malentendu quoi !  Parce que, si on lit bien, jamais il ne s'excuse pour des comportements innacceptables, seulement pour son humour désinvolte et incompris.  À mon avis, ça ressemble à une excuse mais ça n'en est pas une finalement.

Et tous les gens autour de lui qui sont tous tellement surpris alors qu'on dit qu' "il avait une hostie de réputation". Et oui, derrière tout "grand homme", il y a malheureusement beaucoup de complices...

Et il se retire de la gestion de la compagnie et espère sincèrement que ses employés, sur un plan strictement humain, puissent continuer à travailler et n'aient pas à payer le prix de ses comportements.  Se retire-t-il d'un point de vue financier également ?  Si non, ça donne l'impression que, sur un "plan strictement humain", je tente de jouer sur les émotions pour me garantir au moins un revenu pour la suite des événements ?  Une idée comme ça...

Bref, des simili-excuses, une remise en question "profonde" 24h après s'être fait prendre et l'affaire est ketchup, j'aime mon public pis mon public m'aime ?  C'est désolant de voir que ça semble être le cas pour plusieurs. 

Mais bon, personnellement ce qui m'interpelle, ce n'est pas tant l'attitude d'un narcissique qui se croit tout permis parce qu'il est en position de pouvoir que la réponse des gens face à la situation.  Ce n'est pas seulement désolant, c'est inquiétant.

Voici ma lecture des comportements :

  • On a d'abord des gens qui ont un comportement pas très reluisant eux-mêmes et qui se défendent en disant que la victime était consentante.  Autrement dit, eux-autres aussi, quand ils se comportent comme des "trous de beignes", ils n'ont rien à se reprocher. 
  • On a aussi ceux qui veulent se rassurer sur le fait que ça ne peut pas leur arriver à eux d'où leur raisonnement sur la participation probable de la victime.  Les victimes, elles ont couru après, c'est pour ça que ça leur est arrivé.  Mais eux ça ne peut pas leur arriver parce qu'ils font les "bonnes" choses.  La tête dans le sable, vous connaissez ?
  • Ensuite, on a ceux qui s'en foutent carrément "j'ai perdu mon programme de ti-vi, ramenez-moi mon programme de ti-vi, le reste, j'en n'ai rien à branler (jeu de mots intentionnel ici)".  
  • Après, il y a l'agresseur qui tente de redorer son image publique sans éprouver de véritables remords et à qui on est prêt à tout pardonner par "grandeur d'âme". 
  • Et en tout dernier, on a les victimes qu'on blâme et qu'on traite comme les méchants... et à qui on n'accorde aucun support, ou si peu, puisque dans le fin fond, elles ont couru après.


Je l'sais pas mais quand je regarde l'ensemble, il m'semble que le plus beau rôle dans tout ça est celui de l'agresseur, non ?  Bien sûr, il y a des gens qui comprennent qu'il n'y a qu'un seul côté à prendre et c'est celui de la victime mais c'est quand même aberrant de voir combien de personnes écrivent des messages d'hommage à toute fin pratique.

Pour conclure, j'aimerais simplement provoquer une réflexion :

Est-ce possible que le fait de défendre l'agresseur, ou simplement de banaliser ses actions, soit presqu'aussi abject que son comportement lui-même ? 

Sommes-nous, d'une certaine façon, aussi tordus que l'agresseur ? 

Une réflexion s'impose...  peut-être ?

Et une dernière tant qu'à y être : vous rendez-vous compte du pouvoir du nombre ?  Est-ce que ça pourrait s'appliquer à d'autres dimensions de notre réalité ?

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Le texte d'éric Salvail :
Hier j’ai annoncé que je prenais une pause professionnelle de quelques jours. J’étais sous le choc et je ne prenais pas la pleine mesure de la situation. La pleine mesure de mes comportements problématiques. La pleine mesure du tort que j’ai pu causer à des personnes. Et la pleine mesure du nombre de personnes impactées par mes comportements. La situation ne commande pas qu’une pause de quelques jours.

J’ai lu et relu les reportages publiés et le choc a été sans appel avec une perspective extérieure, comme si je lisais sur des personnes que je ne connaissais pas : les comportements rapportés étaient inappropriés et irrespectueux. Pas de place à la nuance, ni au contexte. Or, c’était de moi qu’il était question.

Le constat est brutal : pendant de nombreuses années, dans de nombreuses situations et auprès de plusieurs personnes – bien au-delà de celles qui sont sorties publiquement – mes agissement ont causé du tort.

Certes, je suis exubérant, intense, parfois cru, mon humour généralement consensuel repose souvent sur des malaises, etc. Ce ne sont toutefois pas des justifications valables. Ce qui m’est paru drôle et divertissant comme malaises pendant des années, sans offense ou anodin ne l’était pas pour plusieurs personnes qui le recevaient. Ne l’était pas du tout. Ce qui était pour moi cru ou grivois en privé était vulgaire et blessant pour eux. J’ai toujours avancé à vitesse « grand V » dans la vie, sans jamais me poser de questions à ce sujet. Je reconnais sans réserve que c’était une erreur. Une erreur grave de conséquences pour toutes les personnes que j’ai indisposées. Et grave aussi pour celles qui en subissent les contrecoups aujourd’hui.

J’ai eu l’immense privilège de monter assez haut dans le « showbusiness » québécois. C’est clair, plus on tombe de haut, plus lourdes sont les conséquences. Je tombe de haut. À l’évidence, je suis l’unique responsable de ce qui se passe.

Quand on tombe de haut, il en résulte des traces avec lesquelles il faut composer quand on veut se relever. Dans la présente situation, personne n’a contribué à ma chute. J’en suis l’unique responsable, je le répète. Et quand on se relève d’une chute, il faut d’abord se remettre à marcher avant de se remettre à courir. Pour moi, la course, ça a toujours été de pratiquer ce métier qui repose d’abord sur la confiance et l’affection du public. Je suis aujourd’hui désolé d’avoir lourdement affecté la confiance et l’affection du public.

Aujourd’hui, devant pareils constats, je ne sais donc pas si je vais pouvoir me remettre à courir un jour. Il est néanmoins assuré que je ne pourrai plus courir comme je l’ai fait pendant tant d’années en pensant que mes comportements n’étaient qu’anodins, désinvoltes ou même drôles à partir des malaises qu’ils suscitaient.

Mes actions prioritaires sont tournées vers les nombreuses personnes qui ont subi mes comportements déplacés. Je vous ai offensés. Je vous ai dérangés. Je vous ai blessés. Je le reconnais. Avec humilité et désolation. Je m’en excuse. Sincèrement.

À tous mes amis et collaborateurs du milieu artistique : je vous demande pardon de vous décevoir ainsi. À mon humble avis, personne parmi vous n’est complice de mes agissements.

D’autre part, les émissions que ma boite produit sont portées par une quarantaine de professionnels et des centaines d’artistes, artisans et techniciens qui n’ont rien fait pour que leur emploi soit aujourd’hui en danger. La vaste majorité de ces productions n’ont rien à voir avec moi.

Je me retire donc des activités de Salvail & Co, en déléguant toutes les responsabilités et pouvoirs à mon équipe en qui j’ai pleinement confiance. Sur le plan strictement humain, je souhaite de tout cœur qu’elle puisse continuer à travailler et qu’elle n’ait pas à payer le prix de mes comportements.

À ce stade-ci, je suis d’avis que tout ce que je fais ne doit pas être du ressort du changement superficiel parce que les gens ne sont pas dupes. La situation requiert que j’agisse sur le fond mais que je tente néanmoins de sécuriser les emplois de ceux qui n’y sont pour rien…

Dans le cadre de mon retrait de la gestion de la compagnie, une chose additionnelle a été convenue : mettre en place une politique robuste pour assurer que toutes les activités de Salvail & Co soient exemptes de tout comportement qui serait déplacé.

Maintenant le public, les organisations et les entreprises qui m’ont fait confiance. Je n’ai pas été à la hauteur. Je vous ai profondément déçus. Je comprends toutes les décisions prises et les émotions exprimées depuis hier. Je les respecte. Je vous manifeste quand même ma désolation de vous avoir indisposé, par association.

Quant à moi… J’ai du travail à faire. Pour vrai. Peu importe quand, comment et dans quelles circonstances j’ai souvent agi de manière inappropriée, j’ai la responsabilité de ces comportements déplacés. Un peu comme un alcoolique peut consulter pour ne plus avoir de consommation déviante et pour comprendre celle-ci autant que ses conséquences, c’est ce que je dois faire pour mes propres comportements avec des spécialistes en la matière. Comme des alcooliques peuvent se redéployer dans la sobriété, c’est clairement le défi qui m’attend.

Pour des semaines… des mois… je ne le sais pas encore… je suspens ma carrière pour, d’abord, me concentrer à sécuriser les emplois de toutes ces personnes et ensuite m’investir avec sincérité dans une démarche rigoureuse.

Ma vie a toujours été ma carrière. Ma carrière a toujours été ma vie. Ce n’est plus le cas. Je n’en suis pas victime. J’en suis la cause.

Au revoir.

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